La garantie du droit à un recours effectif dans le cadre d’une procédure fiscale-administrative : Tribunal constitutionnel espagnol, arrêt n°160 du 16 novembre 2020

Veille de jurisprudence fiscale

Essentiels : Impôt sur les successions et les donations – Notification viciée d’un acte administratif – Interruption du délai de prescription.

Le 16 novembre 2020, le Tribunal constitutionnel espagnol a été saisi d’un recours contre une décision judiciaire rendue au cours d’une procédure fiscale-administrative, ordonnant au requérant de payer le montant de l’impôt sur les successions et une surtaxe d’amende, malgré le fait qu’au cours de la procédure un certain nombre de résolutions ne lui ont pas été dûment notifiées. Le Tribunal était donc amené à déterminer si le droit à un recours effectif du requérant, tel que prévu à l’article 24.1 de la Constitution espagnole, avait été méconnu (Tribunal constitutionnel espagnol, deuxième chambre, arrêt n°160 du 16 novembre 2020, recours en amparo n° 2303-2017).

Décision: Tribunal constitutionnel espagnol, deuxième chambre, arrêt n°160 du 16 novembre 2020, recours en amparo n° 2303-2017

Le Tribunal constitutionnel espagnol était amené à se prononcer sur la constitutionnalité d’une décision proférée par l’Audiencia Nacional [1] au cours d’une procédure fiscale – administrative. Cette décision avait rejeté un recours formé par le requérant contre un acte administrative l’ordonnant de payer l’impôt sur les successions et les donations, suite à son acceptation de l’héritage de ses parents en tant qu’unique héritier.

Le requérant s’est plaint du fait que l’acte administratif a été émis sans que les résolutions[2] qui l’ont précédé ne lui ont pas été communiquées au domicile correct. Il a ainsi souligné qu’il y avait eu une erreur de la part de l’Administration fiscale qui avait ensuite produit le fait pris comme fondement de la décision adoptée par l’Audiencia Nacional, voire le ratio decidendi.

En particulier, le requérant a affirmé que les juges n’avaient pas fait référence aux moyens de preuve fournis pour démontrer l’erreur de notification, produisant ainsi des effets négatifs pour lui. En effet, les juges avaient considéré que le droit de l’Administration fiscale de demander le paiement de cet impôt n’était pas prescrit, obligeant ainsi au requérant à payer le montant des cotisations et la surtaxe d’amende sans avoir eu la possibilité de contester les liquidations.

En conséquence, le requérant a fait valoir devant le Tribunal constitutionnel que son droit à un recours effectif, tel que prévu à l’article 24.1 de la Constitution espagnole[3], avait été méconnu. Il a considéré que l’Audiencia Nacional n’avait pas appliqué la loi dans le respect des principes directeurs du procès. Le Tribunal constitutionnel était donc amené à déterminer si les juges ont fondé sa décision en fait et en droit.

Les magistrats ont cassé et annulé l’arrêt. Ils ont conclu que l’Audiencia Nacional avait ignoré le fait que la notification des résolutions avait été effectuée de manière incorrecte, au mépris du droit du requérant à une protection juridictionnelle effective (art. 24.1). En effet, les magistrats ont pu constater que l’Administration fiscale avait envoyé l’acte administratif lors de la phase dite « d’exécution forcée » (ou de « apremio ») au domicile réel du requérant, mais cela n’avait pas été fait de la même manière lors des étapes précédentes avec les résolutions qui l’ont précédé. Par conséquent, l’Audiencia Nacional avait omis que l’Administration n’a pas agi tout au long de la procédure avec la diligence requise par la loi fiscale générale[4].

De surcroît, les magistrats ont constaté qu’il n’y avait pas de manque de diligence de la part du requérant, car divers documents publics indiquaient le lieu de son domicile réel.

Pour ces raisons, les magistrats ont statué, d’une part, que l’Audiencia Nacional a permis à l’Administration fiscale de bénéficier de sa propre irrégularité en ayant fondé son ratio decidendi sur un fait produit par une notification viciée. De l’autre, que cela a entraîné une situation contraire à l’article 24.1 de la Constitution dans laquelle le requérant n’a pas pu exercer son droit de la défense.    


[1] L’Audiencia Nacional a son siège à Madrid et est une juridiction unique en Espagne, compétente sur tout le territoire national, constituant un tribunal centralisé et spécialisé pour la connaissance de certaines matières qui lui sont attribuées par la loi. Elle a été créée par le décret-loi n° 1/1977.

[2] En espagnol, « propuestas de liquidación ».

[3] FR. Constitution espagnole, Article 24.  « 1. Toute personne a le droit d’obtenir la protection effective des juges et des tribunaux dans l’exercice de ses droits et intérêts légitimes. En aucun cas, ce recours ne peut être refusée. (…) » .

[4]Ley general tributaria”, en ligne, disponible sur : https://www.boe.es/buscar/act.php?id=BOE-A-2003-23186

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