Article 66 de la Constitution :
Nul ne peut être arbitrairement détenu.
L’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi.
En France, l’ordre judiciaire en matière civile (pour rappel, il existe deux types de juridictions : civile et pénale) comprend deux degrés de juridiction et une juridiction de cassation.
En droit commun, après la réforme mise en place par la loi n°2019-222 du 23 mars 2019 (entrée en vigueur le 1er janvier 2020), le premier degré correspond aux Tribunaux judiciaires ; le second degré fait référence aux Cours d’Appel, et la juridiction de cassation est la Cour de cassation.
Attention :
La Cour de cassation n’est pas un 3ème degré de juridiction. Elle ne rejuge pas l’affaire. Elle se prononce uniquement sur la légalité de la décision rendue par les juges du fond.
Les juridictions de droit commun sont celles compétentes pour connaître de tous les litiges, à moins qu’une disposition attribue spécialement compétence à une autre juridiction appelée juridiction d’exception -ou d’attribution- (le Tribunal de commerce, le Tribunal paritaire de baux ruraux, le Conseil de prud’hommes).
La loi du 23 mars 2019 a réformé l’organisation judiciaire. Trois décrets du 30 août 2019 ont été pris en application de l’article 95. Le premier, (décret n°2019-912) détaille les modalités de la fusion des Tribunaux de grande instance (« TGI ») et les Tribunaux d’instance (« TI ») au sein des Tribunaux judiciaires (« TJ »). Le second, crée les Chambres de proximité, les juge des contentieux de la protection (« JCP ») et la spécialisation des Tribunaux judiciaires. Le troisième et dernier fusionne les greffes des TJ et des Conseils de Prud’hommes[1].
L’appel en matière civile fait donc référence à l’un des principes tenant à la hiérarchie des juridictions : le principe du double degré de juridiction. Celui-ci permet au plaideur d’interjeter appel de la décision rendue par les premiers juges et implique une garantie de bonne justice.
Cela dit, traitons en cette occasion 6 aspects principaux sur l’appel en matière civile : sa définition, les décisions susceptibles de faire l’objet de ce recours, sa formation, les délais pour l’interjeter, ses effets et la sanction prévue en cas d’abus.
1. Définition
Comment définit-on l’appel ? L’appel est l’une des voies de recours ordinaires mise à disposition des justiciables, selon certaines conditions définies par la loi et les règlements, qui a pour but de contester en fait et en droit une décision rendue par une juridiction du premier degré, afin de soit la former soit l’annuler.
Article 542 Code de procédure civile (ci-après, « CPC »)
L’appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d’appel.
Article 542 Code de l’organisation judiciaire (ci-après, « COJ »)
L’appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d’appel.
2. Décisions susceptibles d’appel
Quelles décisions en matière civile sont donc susceptibles d’appel ? Le principe est que toute décision est rendue à charge d’appel (article 543 CPC).
Toutefois, dans certains cas les décisions sont rendues en premier et dernier ressort. Cela signifie qu’il est impossible d’interjeter appel contre ces décisions.
À cet égard, le Tribunal judiciaire est compétent en dernier ressort en fonction du montant de la demande :
- En matière civile, sur les actions personnels ou mobilières portant sur une demande dont le montant est inférieur ou égal à 5 000 € (au lieu de 4 000 € pour le Tribunal d’instance, avant la loi du 23 mars 2019).
- Dans les matières pour lesquelles il a compétence exclusive, le Tribunal judiciaire statue en dernier ressort lorsque le montant de la demande est inférieur ou égale à 5 000 €.
- Quelles sont ces matières ?
- Actions en responsabilité médicale
- État de personnes (état civil, adoption, filiation)
- Actions en responsabilité liées à une construction immobilière
- Successions
- Propriété immobilière
- Affaires de sécurité sociale et incapacité (dans ce cas, le Pôle social du Tribunal judiciaire sera le compétent)
- Contestation des décisions prises en Assemblée générale
- Quelles sont ces matières ?
Attention :
Dans les Tribunaux judiciaires, certaines affaires sont confiées à des juges spécialisés. À savoir, (1) le Juge des affaires familiales (dit « JAF »), (2) le Juge des contentieux de la protection (dit « JCP »), (3) le Juge de l’exécution (dit « JEX »).
Ainsi, le JAF connait sur toutes les affaires de divorce et d’autorité parentale. Ensuite, le JCP traite tous les cas de tutelle, bail d’habitation, crédit à la consommation et de surendettement. Enfin, le JEX connait sur les affaires de saisies, saisies de rémunérations et de difficultés d’exécution d’une décision de justice.
Par conséquent, sont susceptibles d’appel les jugements du Tribunal judiciaire qui ne sont pas rendus en premier et dernier ressort.
De surcroît, l’article 544 CPC indique que ce recours est possible contre toute décision qui tranche une partie du principal et ordonnent une mesure d’instruction ou provisoire. Exemple : la décision qui fixe la créance du bailleur à l’égard des locataires et qui ordonne une mesure d’instruction.
Cela est également possible lorsqu’un jugement statue sur (1) une exception de procédure (p.ex. l’incompétence du juge), (2) une fin de non-recevoir (p.ex. la prescription de l’action), (3) un autre incident mettant fin à l’instance.
Finalement, l’article L. 311-2 et ss. du COJ prévoient une liste des cas où ce recours est également possible.
Les plus intéressants sont ceux relatives à, en premier lieu, les décisions relatives à l’élection du président du Tribunal de Commerce. En deuxième lieu, en ce qui concerne les avocats, ce recours est possible contre les décisions relatives aux élections au Conseil de l’Ordre et du Bâtonnier de l’Ordre, celles rendues en matière disciplinaire par le Conseil de l’Ordre, et celles qui ont tranché des litiges nés à l’occasion du contrat de travail des avocats salariés. En troisième lieu, certains Cours d’appel sont spécialement désignés pour trancher les recours contre les décisions rendues en matière de propriété industrielle.
3. Formation
Comment l’appel est-il formé ? L’appel est formé soit par déclaration unilatérale, soit par requête conjointe (article 900 CPC).
4. Délais
Existe-t-il un délai pour interjeter appel ? Oui, 1 mois en matière contentieuse et 15 jours en matière gracieuse (article 538 CPC).
5. Effets
Quels sont les effets du recours d’appel ? L’article 539 CPC, d’une part, prévoit l’effet suspensif : un recours d’appel peut suspendre l’exécution de la décision de 1re instance jusqu’à la décision rendue en appel.
L’article 561 CPC, de l’autre, prévoit l’effet dévolutif : dans ce cas, l’appel remet la chose jugée en question devant la juridiction d’appel pour qu’il soit à nouveau soit à nouveau statué en fait et en droit.
6. Sanctions en cas d’abus
Tout cas d’appel dilatoire ou abusif sera sanctionné par une amende civile. L’article 559 du CPC prévoit une amende d’un maximum de 10 000 €, sans préjudice des dommages-intérêts.
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[1]VIE PUBLIQUE. « Loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice », en ligne, dernière modification 25/03/2019, consulté le 1/12/2022, disponible sur : loi programmation 2018-2022 et réforme pour la justice | vie-publique.fr