Espagne : vaccination à marche forcée contre la Covid-19 ?

Revue de doctrine générale

«Vacunarse a la fuerza» . Note de Gonzalo QUINTERO, professeur de droit pénal à l’université de Rovira i Virgili, Almacén de derecho, 18 novembre 2020. Lien vers l’article

Étant donné la gravité de la pandémie de COVID-19 et l’augmentation progressive du nombre de personnes réticentes à se faire vacciner, cette note vise à expliquer deux aspects.

D’une part, si la législation espagnole prévoit une règle autorisant la vaccination obligatoire. De l’autre, si les conditions pour que cela soit possible sont réunies.

En prélude à son analyse, l’auteur souligne que ce sujet n’est pas anodin. En effet, il rappelle que personne ne peut être forcé à vivre ou à ne pas tomber malade en vertu de la valeur constitutionnelle de la liberté individuelle (article 10 de la Constitution espagnole). Par conséquent, il affirme que l’Organisation mondiale de la Santé doit s’engager en faveur de la vaccination.

En ce qui concerne le premier aspect, l’auteur examine la législation et conclut qu’en Espagne, il n’y a, en principe, aucune obligation légale de se faire vacciner. Bien que l’article 149.16 de la Constitution[1] et l’article 2 de la loi organique n° 3 du 14 avril 1986[2] dotent à l’État d’une compétence exclusive pour prendre des décisions en matière de politique sanitaire et en cas d’épidémie, la loi n° 22 du 24 avril 1980, sur les vaccinations obligatoires et recommandées, prévoit seulement que les vaccins peuvent être recommandés, mais ne fait pas référence à une obligation.

Toutefois, l’auteur rappelle qu’en vertu de l’article 43 de la Constitution il incombe aux pouvoirs publics d’assurer la santé de tous les citoyens, ce qui implique une obligation constitutionnelle de prévenir la propagation des maladies par des mesures jugées appropriées et moins préjudiciables aux droits individuels. Pour cette raison, l’auteur affirme que s’il existe un droit de refuser un traitement médical, il pourrait être limité afin de protéger un intérêt supérieur : la santé publique. Par conséquent, le caractère obligatoire de la vaccination pourrait être constitutionnel en vertu de l’article 43. En fait, l’auteur indique que cela serait conforme aux dispositions de la loi organique n° 3 du 14 avril 1986 et de la loi n° 14 du 25 avril 1986. Ces lois autorisent les administrations publiques à gérer le traitement, l’hospitalisation et le contrôle des personnes qui représentent une menace pour la santé de la population.

En outre, l’auteur mentionne que même dans le contexte d’un état d’alarme[3], qui peut être activé par des crises sanitaires causées par des « épidémies », les vaccinations pourraient également être rendues obligatoires en vertu de l’article 12.1 de la loi organique sur les régimes constitutionnels de crise . Selon ce texte, l’État pourrait adopter « (…) les mesures (…) établies dans les règles de contrôle des maladies infectieuses (…) ».

En ce qui concerne le deuxième aspect, l’auteur examine deux conditions qui doivent être remplies pour que les autorités publiques ordonnent une vaccination obligatoire et conclut qu’elles sont effectivement remplies dans la pratique. D’une part, l’Espagne est, en termes de droit pénal, dans un état de nécessité[4] face à la lutte contre une pandémie déclarée. De l’autre, nonobstant le vaccin contre la Covid-19 présent des risques d’effets indésirables, ce n’est pas un obstacle. En effet, l’auteur souligne que chaque personne peut réagir différemment au vaccin, de sorte que si un protocole de prévention est correctement mis en œuvre, ces risques potentiels pour la santé seraient évités.

L’auteur conclut sa note en explicitant sa position pour un vaccin obligatoire contre la Covid-19 et en soulignant deux aspects importants. Premièrement, l’auteur indique que tout litige futur portant sur l’obligation vaccinale doit être tranché par les tribunaux comme cela a déjà été fait dans les cas où les parents ont exprimé leur opposition aux programmes de vaccination infantile. Deuxièmement, l’auteur souligne que tout dommage corporel subi par ceux qui seront contraints à se faire vacciner doit être indemnisé par l’État conformément à l’article 139.1 de la loi n° 30 du 26 novembre 1992[5].

Lien vers l’article


[1] Constitution espagnole de 1978. Article 149. 1. « L’État jouit d’une compétence exclusive pour les matières suivantes : (…) 16) santé publique ; bases et coordination générale de la santé ; législation sur les produits pharmaceutiques ; (…) ».

[2] Loi organique n° 3 du 14 avril 1986. Article 2. « Les autorités sanitaires compétentes peuvent prendre des mesures d’examen, de traitement, d’hospitalisation ou de contrôle lorsqu’il existe des éléments de preuve raisonnables suggérant que la santé de la population est mise en danger en raison de l’état de santé spécifique d’une personne ou d’un groupe de personnes ou en raison des conditions sanitaires dans lesquelles une activité est exercée. »

[3] Pour rappel, el estado de alarma, prévu par l’article 116 de la Constitution espagnole et la loi organique n°4 de 1981, est le régime constitutionnel de crise le plus analogue à l’état d’urgence français. Il permet l’adoption des mesures exceptionnelles pour répondre aux catastrophes naturelles, aux crises sanitaires, à la paralysie des services publics essentiels et au défaut d’approvisionnement en produits de première nécessité.

[4] Article 20.5 du Code pénal espagnol.

[5] Article 139 – Principes de responsabilité.

1. Les particuliers ont le droit d’être indemnisés par les administrations publiques compétentes pour tout préjudice qu’ils subissent sur l’un de leurs biens ou droits, sauf en cas de force majeure, à condition que ce préjudice résulte du fonctionnement normal ou anormal des services publics.

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